Qu'est-ce que l'ingénierie durable ?
Dans un monde confronté aux enjeux climatiques, l’industrie est à un tournant !
Dans un monde confronté aux enjeux climatiques, l'industrie doit se transformer pour produire mieux et autrement. C’est ce que nous allons explorer avec Sébastien Guyot, Directeur du développement et de la stratégie chez ERAS, une société d’ingénierie intégrée à la division industries des procédés d’Equans.
Quels sont les principaux leviers pour rendre nos industries plus sobres et résilientes ?
Cela passe par moins de gaspillage, plus d’efficacité, moins d’émissions, et davantage d’innovation. Pour y arriver, il faut revoir notre façon de produire. L’ingénierie joue un rôle clé dans cette transformation en accompagnant les industriels sur deux axes principaux : la décarbonation des installations existantes et l’émergence de nouvelles façons de produire, plus respectueuses de l’environnement.
Pouvez-vous expliquer en quoi consiste le métier d’ingénieur chez ERAS ?
Je dirige le développement et la stratégie pour une société d’ingénierie appelée ERAS. Ce n’est pas toujours facile à expliquer simplement, car notre métier est complexe. Je fais souvent le parallèle avec celui d’un architecte. Ce dernier conçoit la maison d’un particulier en fonction de ses besoins ; il les traduit en plans et en cahiers des charges.
Notre rôle est similaire, mais nos clients sont des industriels. Nous concevons ou réaménageons leurs usines selon leurs besoins, réalisons les plans, et pilotons les travaux en collaboration avec des entreprises spécialisées, comme des constructeurs de tuyauteries ou de bâtiments.
Comment nos métiers évoluent-ils pour répondre aux enjeux de durabilité ?
Chez nous, ce que nous appelons « l’ingénierie durable », c’est d’adapter ces travaux à une industrie plus respectueuse de l’environnement. Par exemple, en aidant nos clients à respecter leurs engagements de décarbonation. Cela concerne surtout les industries déjà implantées, avec lesquelles nous travaillons sur des thématiques variées.
Un autre aspect est de faire émerger de nouvelles façons de produire des molécules d’intérêt via des procédés alternatifs à la chimie du pétrole. L’objectif est de développer des solutions décarbonées, convaincre les investisseurs et élaborer des plans pour les usines du futur.
Auriez-vous un exemple concret d’accompagnement de start-up ?
Un très bon exemple est la start-up Elyse Energy. Elle utilise des technologies pour produire des carburants de synthèse destinés à l’aviation civile ou au transport maritime. Nous l’accompagnons dans la maturation de ses projets en réalisant des études de faisabilité technico-économiques.
Nous concevons les premiers plans et imaginons l’implantation des usines. Ce type de projet combine captation de carbone et production d’hydrogène, deux thématiques très actuelles. L’hydrogène, par exemple, est utilisé avec le carbone capté pour produire ces carburants.
On associe souvent la durabilité à la décarbonation, mais est-ce réducteur ?
Bien que la décarbonation soit un enjeu majeur, la durabilité couvre bien d’autres aspects. En effet, nous travaillons également sur l’efficacité énergétique, le remplacement des énergies fossiles, la récupération de chaleur fatale et son intégration dans des réseaux de chaleur urbains.
Imaginez une usine dont les machines génèrent de la chaleur. Au lieu de la laisser se dissiper, nous la réutilisons pour chauffer de l’eau, alimenter des procédés ou des bâtiments. Résultat, moins de consommation d’énergie, moins de gaz à effet de serre et une réduction des coûts énergétiques.
Qu’en est-il de la gestion de l’eau, qui devient une ressource de plus en plus précieuse ?
La ressource en eau est un enjeu critique, surtout avec les sécheresses de plus en plus fréquentes. Nous travaillons sur le recyclage, la réutilisation, et même sur des concepts de neutralité hydrique où l’eau prélevée est entièrement régénérée.
Les industries doivent-elles également s’impliquer dans le recyclage des matériaux ?
Il y a le recyclage des matériaux, comme les métaux rares ou les panneaux photovoltaïques en fin de vie. Nous concevons des usines capables de réextraire du silicium, de l’argent ou du lithium des batteries pour les réintégrer dans de nouveaux cycles de production. Même des déchets comme la laine de verre peuvent être valorisés pour leur donner une seconde vie.
Quels sont les résultats concrets de cette démarche durable chez ERAS ?
Chez ERAS, ces projets durables représentent aujourd’hui 40 % de nos activités, et nous visons 50 % d’ici 2025. Cela illustre bien que la transition durable ne soit pas qu’une ambition : c’est une trajectoire mesurable et concrète.
Dans cette démarche, nous travaillons aussi avec des start-ups pour produire des molécules à partir de biomasse, développer des matériaux comme le cuir végétal ou encore extraire des molécules d’intérêt d’algues pour des usages médicaux ou agricoles. Ces projets, que nous appelons « Projets Planète », sont autant de solutions innovantes pour une industrie plus responsable.
Cette sensibilité à la durabilité, est-ce également un engagement personnel pour vous ?
Cette sensibilité à l’environnement dépasse le cadre professionnel. Passionné de montagne, je trouve dans la nature une source d’inspiration. Comme dans une randonnée, avancer vers une industrie durable c’est choisir le bon chemin, parfois sinueux mais toujours porteur de promesses.